En France, l'enfant est encore trop souvent oublié lorsque l'on parle de violences conjugales. Pourtant les droits et les besoins de l'enfant doivent être pris en compte dans cette situation. D'autant plus qu'il n'est pas à l'abri de conséquences néfastes à court et à long terme. Maltraitance des enfants et violences conjugales peuvent malheureusement être associées. Le médecin généraliste a un rôle à jouer.
Les enfants peuvent être des témoins directs des scènes violentes s'ils se trouvent dans la même pièce. Ils peuvent également entendre des paroles ou des gestes violents. Ils savent aussi reconnaître des traces des épisodes de violences: objets cassé, hématomes, mère en pleurs... Parfois, ils deviennent des victimes accidentelles des violences, en voulant s'interposer par exemple. Ils sont aussi des victimes directes de maltraitance pour une partie d'entre eux.
Dans tous les cas, l'exposition aux violences renvoie à la menace qui pèse sur ces enfants et la nécessité d'agir pour les protéger.
* Vivre dans une famille violente est une situation complexe pour l'enfant. Elle est vécue de différentes manières :
* Les besoins de l'enfant peuvent être mis à mal
En pratique : Ces explications permettent de mieux appréhender le fonctionnement de l'enfant exposé aux violences. En effet, des conduites inadaptées peuvent être l'expression d'une souffrance en lien avec un climat familial défavorable à son épanouissement et à sa construction psychique et affective.
Les symptômes qu'un enfant exposé aux violences est susceptible de présenter varient selon son âge. La santé mentale et physique, le développement cognitif et scolaire, et le fonctionnement social peuvent être altérés. Ces symptômes ne sont pas spécifiques de l'exposition aux violences conjugales.
Psychologique | Physique | Cognitif et scolaire | Comportemental et social | |
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Nourrisson | - Pleurs excessifs | - Retard staturopondéral - Troubles de l'alimentation - Troubles du sommeil | -Inattention | |
2-4 ans | - Anxiété - État de stress post traumatique - Cauchemars | - Plaintes somatiques - Enurésie/ Encoprésie | - Retard de langage et de compréhension | -Dépendance - Agressivité - Cruauté envers les animaux - Destruction de biens |
5-12 ans | - Anxiété - Dépression - État de stress post traumatique - Faible estime de soi - Culpabilité - Sentiment d'insécurité - Confusion et ambivalence | - Plaintes somatiques | - Difficultés de concentration - Mauvais résultats scolaires | - Agressivité - Repli sur soi - Destruction de biens - Séduction / Manipulation / Opposition - Vision stéréotypée des genres : manque de respect envers les femmes |
Adolescence | - Dépression - Suicide et tentative de suicide - État de stress post traumatique - faibles estime de soi - culpabilité | - Plaintes somatiques | - Baisse des résultats scolaires | - Agressivité - Abus de substances - Fugues - Délinquance - Repli sur soi - Vision stéréotypée des genres : manque de respect envers les femmes |
À l'âge adulte, le retentissement de l'exposition aux violences peut persister et contribuer à perpétuer la violence au fil des générations, que ce soit en tant que victime ou en tant qu'agresseur.
La concomitance de la maltraitance* de l'enfant et des violences conjugales n'est pas rare. Elle varie entre 30 et 70% selon les études nord américaines. Le retentissement de l'accumulation de plusieurs types de violence est d'autant plus qu'il n'est pas sur le développement de l'enfant. Lorsqu'il devient lui-même la cible directe des agressions, cela peut être un moyen pour l'agresseur de menacer la mère. A noter que la mère peut également agresser son enfant.
Parmi ces enfants, une partie ne présente pas de symptômes particuliers, il s'agit d'enfants résilients* ou en lutte. Les autres présentent des problèmes différents avec un retentissement important sur leur développement. L'identification de facteurs de risque et de facteurs protecteurs permet de mieux comprendre ces différences. Ils concernent l'enfant lui même, sa famille et son environnement.
En tant que médecin généraliste, le suivi des enfants fait parti de notre pratique quotidienne. Face à certains symptômes inhabituels, il faut savoir penser à l'éventualité d'une exposition aux violences conjugales, comme pour les maltraitances .
Les signes d'alerte évocateurs d'une situation à risque pour l'enfant sont :
Évaluer les répercussions des violences sur l'enfant, sa sécurité, sa protection et son soutien.
Faire le point sur la capacité des parents à exercer leur fonction et proposer un soutien parental si nécessaire.
Recueillir la perception de la mère ET de l'enfant, lorsque son âge le permet, sur les répercussions des violences et les risques encourus par l'enfant.
Établir quels sont les facteurs de risque et les facteurs protecteurs.
Alerter et protéger (selon la situation) : signalement (si danger imminent) ou information préoccupante.
Proposer un suivi de l'enfant par des professionnels spécialisés en vue d'un soutien et/ou d'une prise en charge thérapeutique, l'un des objectifs étant de laisser un espace de parole à l'enfant.
Ouvrir le dialogue avec l'enfant : l'enfant exposé aux violences est sans cesse soumis au secret. Lui offrir la possibilité de l'écouter, c'est lui montrer qu'il n'est pas seul et qu'on reconnaît qu'il souffre de cette situation.