Declic Violence

AIDE AU REPÉRAGE ET À LA PRISE EN CHARGE DES VIOLENCES CONJUGALES EN MÉDECINE GÉNÉRALE

Signalement et secret médical

    * Le signalement :


    Il concerne les situations graves nécessitant une protection judiciaire sans délai.

    En fonction de la victime :

    ° victime mineure ou majeure vulnérable* → obligation de signalement pour le médecin

    (* majeure vulnérable : personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique. Une femme enceinte est également considéré comme une personne vulnérable si l'auteur des violence à conscience de cet état de grossesse)

    ° victime majeure → possibilité de signalement pour le médecin


    Cas de la victime majeure :

    Autorisation du levé du secret médical si danger imminent et victime sous emprise. 
    Le conseil de l'ordre de médecins à créer des document pour aider à évaluer le danger et l'emprise :

    Le signalement de violences contre la volonté de la victime n'est pas une décision facile à prendre pour un médecin. Pour faciliter cette procédure, la décision peut être prise de manière pluriprofessionnelle, mais la discussion devra garantir l’anonymat de la victime.

    Le professionnel de santé doit s’efforcer d’obtenir l’accord de la victime majeure ; en cas d’impossibilité d’obtenir cet accord, il doit l’informer du signalement.

    Rédaction du signalement :

    Même règles que pour un certificat descriptif : signaler uniquement les faits constatés, rapporter les dires et les confidences de la victime entre guillemets, nul tiers ne doit être mis en cause.

    → voici les documents à utiliser :
             - pour les personnes majeures : https://www.conseil-national.m... 
             - pour les mineurs  : https://www.conseil-national.m...

    Destinataire du signalement : le procureur de la République

    Le document doit être adressé directement au destinataire et ne doit jamais être remis à un tiers.

    Modalités d’envoi du signalement :

    Par courrier électronique pour accélérer la prise en charge. L'adresse mail sera obtenu après appel du tribunal judiciaire du lieu de l'agression ou du lieu de résidence de la victime. (annuaire)

    Si, dans l’urgence, le signalement au procureur est effectué par téléphone, il sera confirmé par un document écrit, daté et signé.

    Prise en compte du signalement :

    - un accusé de réception est adressé par le parquet au signalant
    - le procureur saisit en urgence l’association d’aide aux victimes agréée pour porter assistance à la victime dans les meilleurs délais).
    - l’association tient informé le procureur des actions mises en place ou du refus de la victime
    - une enquête est lancée
    - choix d’une mesure de protection : ordonnance de protection, téléphone grave danger, bracelet anti-rapprochement
    - information du signalant sur l’orientation de la procédure


    * L'information préoccupante :

    Concerne les mineurs en danger ou en risque de l'être dans les situations qui ne nécessitent pas d'action en urgence (auquel cas il faut plutôt réaliser un signalement).

    Quand la santé, la sécurité ou la moralité du mineur sont considérées être en danger ou en risque de danger. Quand les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont considérées être gravement compromises ou en risque de l'être.

    Le professionnel de santé peut informer les personnes exerçant l'autorité parentale des démarches sauf intérêt contraire de l'enfant (risque de mettre l'enfant en danger, risque de se mettre en danger en tant que médecin, la famille cherche à éviter la rencontre avec les services de protection de l'enfance).

    L'accord du mineur n'est pas obligatoire.

    En pratique :

    L'information préoccupante se fait via la CRIP (cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes). L'information est transmise au médecin de la CRIP par téléphone ou par courrier. Cette structure a également un rôle de conseil, d'information et d'accompagnement des professionnels. Il en existe une par département (annuaire des CRIP) .

    Prise en compte de l'information préoccupante :

    - le dossier est étudié par l'ASE, la PMI et le service social départemental
    - les procédures mises en place peuvent être :
             - une protection judiciaire (via un signalement)
             - une protection administrative 
             - une prise en charge médico-sociale  
             - un classement sans suite

    Le circuit de l'alerte pour les mineurs
    Le circuit de l'alerte pour les mineurs, d'après le guide du Conseil départemental du Puy-de-Dôme intitulé "Alerter et Protéger", 2011.

    * article 4 du code de déontologie médicale: Secret professionnel (article R.4127-4 du CSP)

    "Le secret professionnel, institué dans l’intérêt des patients, s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris."

    * article 226-13 du code pénal: De l'atteinte au secret professionnel

    "La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende."

    * article 226-14 du code pénal: Dérogations légales au secret professionnel

    L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :

    1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;

    2° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;

    3° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui porte à la connaissance du procureur de la République une information relative à des violences exercées au sein du couple relevant de l'article 132-80 du présent code, lorsqu'il estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat et que celle-ci n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur des violences. Le médecin ou le professionnel de santé doit s'efforcer d'obtenir l'accord de la victime majeure ; en cas d'impossibilité d'obtenir cet accord, il doit l'informer du signalement fait au procureur de la République ;

    4° Aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une.

    Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s'il est établi qu'il n'a pas agi de bonne foi. »

    * article 9 du code de déontologie médicale : Assistance à personne en danger (article R.4127-9 du CSP)

    "Tout médecin qui se trouve en présence d’un malade ou d’un blessé en péril ou, informé qu’un malade ou un blessé est en péril, doit lui porter assistance ou s’assurer qu’il reçoit les soins nécessaires ."

    * article 223-6 du code pénal : De l'entrave aux mesures d'assistance et de l'omission de porter secours

    "Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

    Sera puni des mêmes peines quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours."

    * article 43 du code de déontologie médicale : Protection de l'enfance (article R. 4127-43 du code de la santé publique)

    « Le médecin doit être le défenseur de l'enfant lorsqu'il estime que l'intérêt de sa santé est mal compris ou mal préservé par son entourage ».

    * article R. 226-2-2 du code de l’action sociale et des familles : L'information préoccupante

    « L’information préoccupante est une information transmise à la cellule départementale mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 pour alerter le président du conseil départemental sur la situation d'un mineur, bénéficiant ou non d'un accompagnement, pouvant laisser craindre que sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou en risque de l'être ou que les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou en risque de l'être. La finalité de cette transmission est d'évaluer la situation d'un mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont ce mineur et sa famille peuvent bénéficier ».

    * article 44 du code de déontologie médicale : Sévices (article R.4127-44 du code de la santé publique)

    "Lorsqu’un médecin discerne qu’une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection. Lorsqu’il s’agit d’un mineur ou d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, il alerte les autorités judiciaires ou administratives, sauf circonstances particulières qu’il apprécie en conscience."

    * article 222-8 du code pénal : Personnes vulnérables

    "... Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur..."

    * article 434-3 du code pénal : Des entraves à la saisine de la justice

    " Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

    Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13."

    • Le secret professionnel s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Il existe des dérogations légales au secret médical. Dans le cas de violences exercées sur un mineur ou une personne majeure vulnérable ou de violences conjugales avec un péril imminent, la loi autorise le médecin à dénoncer ces violences sans l'accord de la victime. Le médecin bénéficie d'une protection disciplinaire, civile et pénale, s'il signale ou informe uniquement les faits et ce qu'il a constaté, en toute « bonne foi » (la « bonne foi » peut se définir comme la croyance juste de se trouver dans une situation conforme au droit, d'après le conseil national de l'ordre des médecins).
    • Toute décision doit être prise dans l'intérêt du patient, avant tout. Concernant les majeurs, la difficulté réside dans l'évaluation de la situation et l'existence d'un "péril imminent". La définition de la "vulnérabilité" sur le plan juridique est : ''toute personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, est considérée comme une personne majeure vulnérable''. Le péril imminent semble évident lorsque la victime est menacée de mort.
    • En cas de difficultés, il ne faut pas rester seul. Un avis peut être demandé auprès des personnes ressources : Unité médico-judiciaire locale, conseil départemental de l'ordre des médecins, sans donner l'identité de la personne ; et pour les mineurs : Centre de Recueil des Informations Préoccupantes du département, numéro vert national maltraitance 119 .

    Chaque situation étant unique, il n'y a pas de procédure prédéfinie concernant cet aspect médico-légal des violences de couple. Toute décision doit être prudente, dans le but de protéger au mieux la patiente et ses enfants, et dépend de l'information, de la formation, de la responsabilité, de l'éthique, de la morale et de la sensibilité de chacun. C'est le lot quotidien du médecin généraliste...