Ces violences sont fréquentes. Elles concernent les patientes qui viennent nous consulter dans nos cabinets de médecine générale jour après jour.
La vigilance du médecin est nécessaire pour repérer les signes d'alerte.
Le dépistage systématique des violences est recommandé pendant la grossesse.
Le dépistage '' systématique '' des violences conjugales suscite toujours un débat internationale. Penser aux violences pendant les consultations doit être un réflexe.
La relation de confiance entre le médecin et la patiente et la façon dont le médecin pose les questions semblent plus importantes que le choix d'un questionnaire de dépistage.
Facteurs de risque, facteurs aggravants | Antécédent de violences familiales dans l'enfance Séparation récente ou en cours Grossesse Isolement social |
Plaintes | Plaintes vagues et inexpliquées Symptômes physiques chroniques inexpliqués : douleurs (pelviennes, lombaires, abdominales, céphalées), asthénie Symptômes physiques multiples |
Comportement | Consultations fréquentes Retard à consulter, oublis de rdv Problème d'observance (traitement, conseils) Incohérence dans le récit |
Signes psychiques | Dépression Etat de stress post traumatique : savoir le diagnostiquer. Anxiété Troubles du sommeil Idées suicidaires, tentatives de suicide Addictions Troubles du comportement alimentaire |
Signes physiques | Blessures/ traumatismes inexpliquées/répétés Douleurs chroniques : pelviennes, lombaires, abdominales, céphalées Asthénie Maladie chronique déséquilibrée |
Santé sexuelle et reproductive | Grossesses non désirées, IVG IST répétées Dyspareunies Fausse couche Métrorragie Manque de soins prénataux |
Liés au partenaire | Trop attentionné Intrusif Agressif |
Liés aux enfants | Rupture dans le comportement Repli sur soi ou hyperactivité Régression des acquisitions ou Maturité précoce Troubles alimentaires Troubles du sommeil Douleurs répétées Rupture scolaire Actes délictueux Mise en péril de soi |
Le dépistage systématique des violences est recommandé pour toutes les patientes enceintes, y compris celles qui demandent une IVG. C'est un consensus international.
Comme nous discutons avec nos patientes du tabac, de l'alcool ou de l'alimentation lors du suivi de grossesse, nous devons aborder la question des violences conjugales.
Plus largement, le thème des violences conjugales devrait être abordé avec les patientes désirant une grossesse et celles ayant accouché il y a moins d'un an.
* L'environnement du cabinet médical doit favoriser la révélation des violences : placer des affiches dans la salle d'attente, des brochures dans les toilettes …
* Un outil de dépistage validé existe : le questionnaire WAST.
Il a l'avantage de dépister les violences psychologiques et physiques. Un résultat ≥ 5 met en évidence une exposition à des violences.
Une version courte du
WAST peut être utilisée : elle consiste à poser les 2 premières
questions : si la
patiente répond « très tendue » en 1 ou « beaucoup de
difficultés » en 2, le professionnel est invité à poursuivre ses
questions pour évaluer la situation plus précisément.
* Le débat international sur le dépistage continue : dépistage systématique ou ciblé ?
Pour le dépistage systématique :
D'un côté, les défenseurs du dépistage systématique militent pour que toutes les femmes soient interrogées sur leur vécu des violences. En effet cette démarche permet d'augmenter l'identification des violences. Il s'agit aussi d'ouvrir un espace de parole à ces femmes qui sont souvent soulagées d'en parler, qui peuvent être écoutées. Le médecin généraliste peut faire le lien entre des symptômes et ces violences et leur donner la possibilité de s'orienter vers des associations spécialisées où elles trouveront de l'aide.
C'est le point de vue de la MIPROF (Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains) en France, de diverses organisations de santé américaines dont «US preventive services task force aux Etats Unis » spécialisée en prévention et en soins primaires. Plusieurs études françaises montrent que les femmes ne sont pas opposées au dépistage systématique de ces violences.
Pour le dépistage ciblé :
De l'autre, l'OMS ne recommande pas la pratique du dépistage systématique des violences conjugales hormis pendant la grossesse. Ce point de vue est partagé par le collège de médecins généralistes australiens et la société scientifique de médecine belge, par exemple.
En effet, les études n'ont pas permis de montrer que le dépistage systématique des violences améliore significativement la sécurité (fréquence des violences), la santé (qualité de vie, dépression...) des victimes de violences ou encore l'utilisation des services de soin et l'orientation vers d'autres acteurs du réseau.
Il peut être encore plus difficile de se confier, d'être identifié comme victime de violences ou d'accéder à des soins et une prise en charge adaptée pour certaines femmes. Elles nécessitent une vigilance particulière.
Certaines personnes âgées, handicapées, présentant des maladies psychiatriques chroniques ou des addictions présentent de ce fait un état de vulnérabilité qui se surajoute à la problématique des violences. Il faut être particulièrement vigilant auprès de ces patientes, qui sont souvent dépendantes de leur conjoint pour leur maladie ou leurs soins.
Les femmes d'origine étrangère qui ne maîtrisent pas la langue française ou qui ne partagent pas les mêmes repères culturels se heurtent à des difficultés plus importantes.
L'orientation sexuelle (homosexuelle, bisexuelle, transgenre) de nos patientes peut rendre la révélation et l'identification des violences plus difficiles.